Kinshasa : Yannick, un autre "grand" de la rue

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Yannick et ses copains de Ndako Ya Biso Imaginez un marché bondé, des couleurs à n'en plus finir, et les yeux qui se tournent, curieux, quand on arrive près du dépôt, où on sait que les « grands » passent la majeure partie de la journée. Un jeune gaillard s'approche tout sourire pour dire bonjour, la démarche marquée de gauche à droite, les poings serrés, les bras arqués sur les côtés pour se donner de la consistance : c'est Yannick, dit aussi Nicky !

A 22 ans, il a déjà 10 ans de vie dans la rue derrière lui. Son père est décédé quand il avait 10 ans d'un accident de bus (il était chauffeur). Vivre seul avec sa mère, c'était difficile, l’enfant avait besoin d'autorité, d’encadrement… Alors, vers l'âge de 12 ans, Yannick est parti de la maison. Rapidement, il a rencontré d'autres jeunes qui sont devenus ses compagnons de galère et il a intégré le groupe de l'État Major.
Depuis qu'il en a la force, il se sert de ses muscles pour gagner sa vie : il porte des sacs de marchandises qui peuvent aller jusqu'à 100 kg. En échange, il reçoit 800 Francs Congolais (environ 1 €), un peu plus s'il travaille la nuit. Mais cette petite misère aura disparu le jour d'après, si ce n'est le soir dans l'ambiance des fêtes quotidiennes. Et il n'a aucun moyen de reprendre une formation pour y changer quelque chose.

Le centre Ndako Ya Biso ? Il connaît, les éducateurs l'ont souvent conseillé quand il était en galère, et il s'y rend pour recevoir des soins quand il se blesse.
Dans la rue, comme la plupart des « grands », Nicky a eu une femme et des enfants. Son premier bébé est décédé au bout de quelques mois, ce qui a été une grande blessure pour lui. Et il ne sait pas où est son deuxième enfant, car la mère est partie avec lui dans une autre ville. Pourtant, Nicky garde sa joie de vivre et sa complicité rend l'amitié facile !

Quand je l'ai rencontré, c'était un jeune très impulsif, et donc violent avec les autres. Je crois sincèrement que l'amitié qui s'est créée entre lui et nous (les animateurs de Ndako Ya Biso) lui a donné un certain cadre qui lui a permis d'évoluer. La fermeté de nos remarques et notre présence constante à ses côtés malgré tout l'a rendu plus sûr de lui. Il savait bien que la rue ne serait pas le lieu propice pour construire une vie stable.

Il savait bien qu'être parti de chez lui n'avait pas été une bonne solution et qu'il avait gâché beaucoup dans la rue... Mais il savait aussi que nous étions là pour le soutenir s'il voulait avancer et que nous resterions fermes sur nos conseils : changer, c'est apprendre à se contrôler, c'est laisser la violence, la drogue...
Et il s'est décidé !
Avec une petite aide de notre part, il a monté quatre murs et un toit de tôle et, aujourd'hui, Yannick ne dort plus au dépôt : il est sorti de la rue, il s'est accroché à sa volonté et il y est arrivé !

C'est un jeune homme posé, calme et fier qui, à la question « Tu habites où ? », nous répond aujourd'hui avec un grand sourire « Na palin na ngai ! » (Dans mon palais).

Étapes par étapes, Yannick avance...

Si vous voulez nous aider, vous pouvez parrainer les enfants des rues de Kinshasa.