Kinshasa : Bob, un "grand" de la rue

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Bob à la fenêtre de son petit logement Bob dit n'avoir jamais connu l'amour de ses parents. Ce dont il se souvient, c'est de leur rejet constant et de ce terrible sentiment de ne pas être désiré. Petit à petit, sa vie familiale est devenue insupportable et l’illusion d’une vie plus épanouie dans la rue l’a poussé à tout quitter. Il avait 10 ans. Comme Yannick, il a intégré l'Etat Major et a subi les aléas de la rue. Ses bras marqués de larges cicatrices en témoignent, bien que Bob soit d'un naturel calme impressionnant ! Après quelques années, Bob a rencontré Lætitia, en rupture familiale elle aussi. Son histoire ? Une grosse crise d'adolescence mal comprise par sa famille, l'absence d'écoute et d'attention, et cette impression tenace que la rue la rendra plus libre...
Au départ, dans la rue, un couple se crée dans un intérêt commun : la fille, souvent très jeune, se met « sous l’aile » d’un garçon, plus âgé, capable de lui assurer un peu de sécurité. En échange, il bénéficie de ses préférences et peut lui demander ce qu’il veut. Elle devient « sa femme », et lui « son homme ». C’est ainsi que les couples se font et se défont dans la rue, au rythme des naissances plus ou moins identifiées et des violences quotidiennes. Les hommes ont besoin de sentir qu’ils ont une véritable emprise sur leur « femme », et celles-ci en jouent exagérément si leur « homme » ne s’occupe pas assez d’elles.

Laetitia et son bébé BrunoPour Bob et Lætitia, c’est un peu comme ça que tout a commencé. Quand je les ai rencontrés, ils squattaient avec d’autres « grands » une vieille bâtisse de quelques mètres carrés. Lætitia était déjà enceinte de 3 mois et ils n’avaient aucune intimité, dormant sur une natte à même le sol avec plusieurs autres couples. Lætitia avait un regard fuyant et elle était très agressive avec les autres filles. Bob était déjà un garçon calme, mais très soucieux. Ils semblaient contents « d’être ensemble », mais on sentait que le bébé à venir les préoccupait énormément. Bob a bien essayé de demander à Lætitia de rentrer en famille pour que l'enfant ne naisse pas « shégué » (enfant des rues), mais elle a rétorqué qu'elle ne sortirait de la rue que s'ils le faisaient ensemble.

Avec courage, Bob a demandé l'aide de Ndako Ya Biso qui les a soutenus pour la location d'un petit 6m². En août 2008, le petit Bruno est né sous un toit, à la joie de ses parents qui se sont démenés pour en arriver là ! J'ai vu Lætitia changer, se mettre à rire, relever la tête et quitter sa violence chronique : elle devenait mère à 17 ans, et maîtresse de maison ! Pour Bob aussi, devenir père et chef de famille a été une grande fierté. « Mon enfant va recevoir l'amour que mes parents ne m'ont pas donné » disait-il…

Bob, Laetitia et Bébé BrunoEn mars dernier, le couple a été secoué par la mort de Bébé Bruno, qui avait une malformation aux poumons, et n'a pas pu être opéré faute de moyens. Le choc a été terrible, et nous avons craint que la perte de cet enfant ne remette en cause leur couple, leur sortie de la rue et même toute leur vie. Mais leur foi et leur volonté d’avancer ensemble a été plus forte, et ils continuent aujourd'hui ensemble ce qu'ils ont commencé. Bob suit une formation de mécanicien, et Lætitia s'occupe de la maison. Bébé Bruno reste dans leurs cœurs celui qui, sans le savoir, leur a donné la force de quitter la rue et de s'en sortir, une bonne fois pour toutes.

Bob et Lætitia sont un exemple impressionnant de « grands » qui ont réussi avec un peu d'aide et beaucoup de force, et la volonté propre de s'en sortir et d'avancer ensemble. Mais ces « grands » qui s'en sortent restent une minorité et le travail est vraiment immense pour la réinsertion des enfants avant qu’il ne soit trop tard :

merci de permettre à Ndako Ya Biso de les aider !

Si vous voulez nous aider, vous pouvez parrainer les enfants des rues de Kinshasa.