Haïti : 2 mois après le séisme, un bilan amer

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Maison de Cité Soleil en Haïti détruite par le séisme Le séisme meurtrier et dévastateur du 12 janvier dernier a tué bien des espoirs. Etant déjà très loin d’être satisfaisante, la vie des habitants de Port-au-Prince et même de ceux de la province, est devenue à la fois triste et douloureuse, puisque près de 300.000 personnes sont mortes. Des milliers de gens sont ajoutées au nombre des handicapés. Toutes les catégories sociales ont subi de grosses pertes matérielles dont le prolétariat auquel font également partie les enseignants.

Condition déshumanisante et révoltante, car des milliers de personnes se voient obligées de se regrouper dans des camps, à la merci des ONG. Certaines gens pouvaient rester dans leur propriété, même si leur maison avait été détruite. Les habitants qui vivent dans les plaines à Port-au-Prince disposent généralement de plus d’espace et peuvent ainsi éviter les camps. A Croix des Bouquets, par exemple, il n’y avait aucun camp d’hébergement durant la première semaine après le 12 janvier. Un voisin qui n’avait que l’espace de sa maison habitait avec son voisin le plus proche, dans la fraternité. Comme conséquence, les victimes de Croix des Bouquets étaient oubliées. Par stratégie de survie, les camps d’hébergements se sont multipliés, mais parfois sans être réellement habités.
Aide matérielle apportée aux familles des élèves des écoles St Alphonse par SOS Enfants suite aui séimse en Haïti Depuis la crise sismique en Haïti, les Nations Unis et les ONG ne voilent plus leur visage. Ce sont elles qui décident. Parce que ce sont elles qui collectent et qui reçoivent les dons de la diaspora, des citoyens étrangers, des Institutions internationales, des pays dits amis et j’en passe. Elles ne tiennent pas compte de la dignité et du respect des citoyens victimes du séisme. Il faut tout simplement se placer dans un camp et attendre, souvent désespérément. Les conditions de vie des victimes dans les camps sont indignantes. Les gens s’y baignent presque tout nus. Des situations de troubles diverses se répètent. On est obligé de partager une tente avec des personnes que l’on n’a jamais connues. Bref, une promiscuité sans pareille.

Il faut signaler qu’immédiatement après le séisme, soit deux jours après, il y a eu une rivalité entre les troupes américaines qui débarquent et la force onusienne qui était déjà sur place. La population se questionnait beaucoup sur l’objectif réel du débarquement américain. Beaucoup de gens de la masse ou de la classe moyenne souhaitaient que Haïti s’ajoute au nombre des états des E.U. En outre, lors d’un discours, Barack Obama a déclaré que tous les haïtiens étaient des américains. Ils attendaient désespérément la concrétisation de ce rêve caressé depuis ces deux dernières décennies.
Selon les rumeurs, la France et les Etats-Unis étaient face à face. Seuls les américains pouvaient débarquer à l’aéroport Toussaint Louverture de Port-au-Prince, occupé par eux. Les américains auraient empêché les français d’atterrir à l’aéroport. La question, pourquoi existait-il cette rivalité dans cette circonstance ? Pourquoi la France, ancienne colonisatrice d’Haïti et les E.U, anciens occupants du pays, se retrouvaient ils opposés dans un contexte où le pays avait été frappé par cette malédiction sismique ?
Or, l’on sait très bien que cette colonie ou cette terre occupée, dite indépendante, est devenue l’un des pays les plus pauvres de la planète, où les habitants vivent en situation plus difficile que des animaux sauvages de l’occident, voire comme ses animaux domestiques.
Qu’en est-il de l’Etat Haïtien ? Il joue sans ballon ! Etant corrompu ou traité comme tel, il est retiré du jeu. Il ne reçoit pas une gourde directement des Etats Unis ou de la France. Chaque pays dispose de ses propres moyens d’interventions. Les ONG administrent, bien entendu, les ONG internationales. Pire, les emplois réservés aux haïtiens sont essentiellement : chauffeur, interprète, démolisseurs de béton, rapporteur ou distributeur. Les universitaires sont très peu invités dans les opérations voire de participer valablement dans les plans d’interventions. Ce qui signifie que les ONG étrangères ont enlevé aux haïtiens la possibilité de tirer des expériences de ces malheurs. Si l’Etat est corrompu, les ONG sont crédibles car ce sont elles qui ont tous les contrôles. Un seul exemple, dans ce débat. A Cité Soleil, l’eau distribuée par Pur Water, est dite eau potable. Dans les points de presse, on scande la quantité de gallons d’eau traitée distribuée par jour. Pourtant, comment cette eau est traitée ? On y rajoute du chlore si l’on s’en souvient. Cette eau a provoqué pas mal de maladies à travers la population. Du 13 janvier à aujourd’hui, plusieurs dizaines d’enfants sont décédés. Combien sont morts par l’eau potable ! Ou par des produits alimentaires avariés, distribués à cette population malheureuse ?
Concernant la réouverture des classes
L'école St Alphonse du bidonville de Cité Soleil en Haïti, gravement fissurée par le séisme Les principaux centres d’établissement scolaires publics et non publics, des plus importants de Port-au-Prince ont été détruits ou gravement endommagés. Le centre ville de la capitale, où se trouvent de nombreuses écoles, a subi les plus grands dommages. Tout le monde parle de réouverture des classes. On parlait du mois de mars. Mais le M.E.N F.P. s’est rendu compte plus tard que la tâche était plus compliquée. A la fin du mois de février, le Ministère a fait une réunion avec les directrices et directeurs d’écoles pour leur notifier les décisions de l’Etat.
La reprise des classes est prévue pour la première semaine du mois d’avril. Les écoles construites en dalle, fissurée ou pas, ne sont pas autorisées à fonctionner. Les écoles en murs et toitures en tôles pourront fonctionner après une expertise. Les écoles effondrées ou fissurées ont plusieurs possibilités :
  • Elles trouvent un espace vide tout près de l’école pour placer des tentes.
  • Elles trouvent un accord avec une autre école disposant de beaucoup d’espace pour fonctionner ensemble.
  • Elles demandent au Ministère d’envoyer une équipe pour déblayer l’école effondrée pour y placer des tentes.
A noter que le Ministère a promis, lors de cette rencontre, des tentes à toutes les écoles publiques et non publiques. Qu’en est-il des salaires du personnel enseignant puisque les parents seront incapables de payer les obligations scolaires ? Le Ministère n’a pas encore de réponse à cette question, mais il reconnait la nécessité d’accompagner toutes les écoles. C’est un dossier qui est à l’étude … En tout cas, jusqu’à cette date, aucune action concrète n’a été faite par le Ministère de l’Education Nationale. Les écoles qui sont déjà déblayées sont des initiatives privées, en fonction de l’accointance du patron ou des responsables des écoles.
N.B : le MENFP prévoit la reprise des cours en avril pour l’achever en août. Il y a donc deux mois ajoutés sur l’année scolaire : juillet et août.
Situation des Ecoles Saint-Alphonse
L'école St Alphonse du bidonville de Cité Soleil en Haïti, gravement fissurée par le séisme, en cours de démolition A Cité Soleil, Saint-Alphonse a finalement été très endommagée par le séisme. C’est vrai, aucun des locaux ne s’est effondré, mais il serait très risqué de leur faire confiance. Ils sont tous fissurés et les parents refuseraient de nous confier leurs enfants dans de telles conditions.

Si l’on veut être sage et prudent, tous les locaux devront être mis à terre sauf peut être les locaux nouvellement construits. Le 5 février dernier, nous avons organisé une rencontre avec les différents employés. Chaque employé présent a expliqué à tour de rôle comment il a vécu l’événement du 12 janvier. En parlant, on pouvait lire la tristesse et la désillusion dans la voix ou le visage de certains intervenants. Le mercredi 10 février 2010, une réunion était tenue avec les parents. Ils venaient avec l’espoir dans cette rencontre. Car ils pensaient que l’école leur réservait quelque chose. Les parents ont été très satisfaits de savoir qu'une aide leur était réservée et que l’école reprendrait prochainement les cours dans un lieu sécurisé. Ils ont évoqué leurs difficultés et la nécessité d’une formation professionnelle. Du 19 au 20 mars, a eu lieu à Fourgy, un séminaire psychopédagogique pour les enseignants et les membres de la Direction de Fourgy. L’objectif de ce séminaire était de permettre aux enseignants de trouver des techniques psychopédagogiques afin de répondre aux nouvelles réalités des enfants. L’organisation et la coordination était assurées par le directeur de l’école. Les intervenants étaient : Frantz Jules, psychologue, ancien élève de Saint-Alphonse et Mackendy Raphaël, pédagogue et sociologue, ainsi que Ricot Pierre, le Directeur de l'école.

Les travaux dans l’école Saint-Alphonse avancent. Il ne s’agit pour l’instant que de sécuriser l’école et préparer la cour qui se trouve juste en face de l’école afin de démarrer les cours le plus rapidement possible. A la Cité Soleil, la démolition d’un bâtiment abritant le dispensaire est déjà entamée, le troisième étage et la deuxième dalle sont déjà démolis. Les déblais sont utilisés pour remblayer la cour qui sera bétonnée pour plus de facilité avec les enfants. Les murs de ce local sont à refaire entièrement et presque achevés. Il reste encore les latrines, une salle pour la direction et la réfection du portail. La cour sera prête pour la reprise des classes début avril, après le week-end de Pâques, les enfants seront abrités sous des bâches.

Après le séisme, l'école a repris à l'école annexe St Alphonse de Fourgy en Haïti A l’Annexe de Fourgy, des travaux ont également entrepris pour sécuriser la cour qui a été remblayée et nettoyée avant l'installation de bâches pour accueillir les enfants. Les activités avec les enfants ont repris depuis le 15 mars. Les enfants sont au nombre d’environ 200, nombre qui augmente régulièrement. Les activités proposées sont pour le moment une remise en confiance des enfants qui restent très traumatisés par le séisme et la perte de parents et du matériel qui les obligent à vivre dans la rue. Les activités sont donc composées principalement de chant, musique, dessins, activités manuelles, expressions orales, activités physiques et sportives.

Il est très important de pouvoir donner aux enfants une alimentation car ils souffrent tous de manque de nourriture ce qui ne favorise pas l’intérêt qu’ils pourraient apporter aux cours. Il est donc vraiment indispensable d’assurer une cantine. Dans l’immédiat, il est impossible de préparer le repas chaud par manque de matières premières, nous distribuons des gâteaux secs et du jus de fruit, mais nous espérons pouvoir très vite assurer à nouveau un service de cantine normal.

Nous remercions tous les donateurs, parrains et marraines qui nous soutiennent dans nos efforts pour la reprise des activités avec les élèves, la sécurisation des locaux puis, dans un second temps, la reconstruction des écoles. Cette reconstruction devra être bien réfléchie et repensée en respectant les nouvelles normes établies par l’Etat en la matière ainsi que les besoins des élèves et des enseignants.
Vous qui lisez ces lignes, rejoignez notre action !
Grâce au parrainage d'enfants, tous ensemble, nous participerons au changement des conditions de vie des jeunes de notre bidonville et contribuerons ainsi à faire revenir la paix dans Cité-Soleil.

Ricot Pierre
Directeur Ecole St Alphonse
Port-au-Prince, 26 mars 2010